Merzbow, Pulse Demon

Alice M. – Janvier 2018

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I threw all my past music career in the garbage. There was no longer any need for concepts like “career” and “skill”. I stopped playing music and went in search of an alternative.
— Masami Akita

Hop !

Continuant sur ma lancée musicale, je vais tenter d'aligner quelques mots sur un album. Cependant, afin de ne pas me mettre la pression outre mesure, l'œuvre considérée ici sera naturellement impossible à évaluer avec des moyens standards ; cela rendra potentiellement ma prose tout autant intouchable : quand les objectifs ne sont pas définis, il est plutôt difficile de faire des reproches constructifs. L'avantage est que je peux me concentrer sur mon ressenti et écrire d'une manière presque aussi expérimentale que cet album.

Je fais figure de débutant insignifiant dans le milieu du harsh noise. J'ai surtout touché à du Merzbow, mais j'ai aussi eu un coup de cœur pour le relativement accessible While You Were Out de Kazumoto Endo (bien que ça ressemble souvent à des bruits de travaux) trouvé au détour d'une suggestion YouTube, et j'ai pu goûter rapidement à du Masonna (une figure plutôt reconnue du milieu) ou à du Aube. Hélas, même quand il s'agit de Merzbow, on peut dire que je suis bien loin d'avoir une vision d'ensemble de ses (à l'heure actuelle) 295 albums studio, 32 EP, et j'en passe. Je ferai de mon mieux pour rattraper au moins partiellement ce retard un jour, car je trouve absolument fascinant le récit que Wikipédia fait de ses changements d'outils faiseurs de bruits au fil des années. Bref, je ne suis probablement guère plus avancé que vous, au fond. J'ai néanmoins décidé, faute de meilleure solution, de voir mon inexpérience comme une opportunité plutôt qu'une tare : je vais explorer le monde du bruit à vos côtés tout en écrivant cette critique, qui va de ce fait se changer à moitié en essai sur le thème du harsh noise tel que je le connais et le perçois. Chaque chose en son temps, disons, mais il me fallait bien une base à partir de laquelle discourir…

Noter qu'un lecteur Bandcamp (que j'ai rendu rétractable) traîne normalement dans un coin de la page. J'n'sais pas trop à quel point il est géré par les navigateurs mobiles.

Qui, quoi, quand

Le sous-genre de sous-genre de sous-genre musical connu sous le nom « harsh noise wall » (plus ou moins littéralement « rude mur de bruit ») n'a pas vraiment besoin d'une longue description : primo, l'idée est très bien exprimée par le nom du style, et secundo, on peut comprendre le délire avec un extrait de deux secondes à peine. En bref, les mecs font des bruits bizarres de pas mal de manières différentes, se débrouillent pour que ça soit assez constant et monolithique, et s'en fichent complètement si les auditeurs dérouillent. Autant dire que l'ordre et la douceur règnent, quoi ; mais du moment que tout le monde est consentant, pourquoi pas ?

Débutant ou pas, je me dois tout de même de tenter de situer l'album d'un point de vue historique. Il est sorti en 1996. À cette période, Merzbow commençait à fortement s'intéresser à certains styles de métal extrême, et cela l'a pas mal influencé. Bien que Pulse Demon ne soit pas considéré comme la conséquence directe de ces influences, l'agressivité est bien là (surtout si on compare ce disque à celui nommé 1930, sorti seulement deux ans plus tard) et le mixage a été fait à un volume écrasant tout ce que j'ai pu entendre jusque-là. On trouve déjà pas mal de références à des animaux dans les titres, mais ce n'est que quelques années plus tard que Merzbow s'est mis à élever des poulets puis à devenir végan et à foutre des autocollants « Meat is murder » sur ses ordis.

Structure ?

Le fait qu'il y a plusieurs pistes alors que chacune n'est pas, a priori, pourvue d'une structure digne de ce nom pourra surprendre (même si on est plus à ça près). Pour ne rien arranger, chaque morceau commence et s'arrête brutalement. Je ne veux pas juste dire par là que c'est soudain, mais carrément qu'on dirait que le morceau, à l'origine, était plus long, et qu'on en a coupé les extrémités comme on le fait parfois avec les gâteaux roulés. À chaque conclusion, on s'attendrait presque à voir surgir un gars faisant : « Haha ! J'vous ai bien eus ! » Dans certains cas, je me dis également quelque chose comme : « Oh, nan ! Je voulais savoir ce qui venait derrière ce “BZZTRSHHHHZTHTH” ! » Si, si, je vous jure. Sauf qu'après tout, si j'avais effectivement su que la suite était un « BRUZBRUBZ », eh bien j'aurais ensuite de nouveau voulu connaître la suite. Cette approche du gâteau roulé est donc, tout bien considéré, plutôt bien adaptée à ce style.

En résumé, non content d'avoir mis au placard la majorité des principes et notions qui ont forgé la musique traditionnelle, Merzbow a également l'air de trouver le concept même de début et de fin assez étrange, et ne s'encombre ni d'introductions ni de conclusion. Peut-être que des fondus en fins de morceaux auraient, au fond, sonné de manière encore plus étrange que ces coupures nettes… Et puisque ce détachement du principe de structure se retrouve à tous les étages, on ne sait pas trop où s'arrêter si on doit faire une pause, l'avantage étant que de toute manière, une fois revenu des toilettes ou de ce que vous voulez, on replonge dans le bordel instantanément et on se dit que ce n'est finalement pas si grave d'avoir mis l'album en pause quelques minutes.

Selon votre lecteur, vous obtiendrez des effets différents : si vous utilisez un truc tout pourri (ou un lecteur en ligne), vous vous retrouverez avec une pause bizarre entre les morceaux, le temps que le suivant soit chargé, tandis qu'avec des outils de qualité (typiquement OSMC / Kodi ou MOC ♥), si on ne prête pas trop attention à ce qu'il se passe, les morceaux sont comme collés les uns aux autres, sauf qu'un « BZZZZTTZRT » peut par exemple être soudainement coupé pour être remplacé par un « BRUBRUBRUBRU » ou que sais-je encore, ce qui renforce l'aspect monolithique du style. Vous vous retrouvez alors avec un parpaing de plus d'une heure, sorte de cousin dégénéré des gros morceaux ambiants de relaxation.

Quoi qu'on puisse en dire, il y a tout de même des différences d'ambiance entre les pistes. Il est d'ailleurs amusant de constater les différences de longueur entre les morceaux (cela va de moins de quatre minutes à presque vingt-cinq). On aura tendance à se dire : « Ah, bah ça devait avoir du sens, pour lui, si il a découpé ça comme ça… » Pour ne rien arranger, les titres sont, comme souvent avec le noise d'ailleurs, plutôt étranges. Je reviendrais plus tard sur l'individualité des morceaux, car je trouve que ça n'est pas non plus la partie la plus intéressante qui soit.

De toute façon, les gens ne savent plus ce qu'est un rythme, alors bon…

Même s'il n'y a généralement pas de rythme facilement identifiable, il n'est pas rare que les nombreuses boucles employées par Merzbow induisent une forme de battement régulier, parfois très précis sur le plan temporel. D'ailleurs, Merzbow est connu pour utiliser plus d'éléments rythmiques que la plupart de ses confrères (en entendant la piste Ultra Marine Blues, on pourrait presque même se dire qu'il est trop clément). Je crois qu'il utilise parfois des percussions, et on entend effectivement quelque chose qui y ressemble de temps en temps, comme sur le début de Tokyo Times Ten, mais difficile pour un novice comme moi d'identifier convenablement tous ces sons si inhabituels.

Ces battements sont assurément volontaires à de nombreux endroits. Cependant, même en leur absence il y a souvent quelque chose auquel on peut se rattacher rythmiquement parlant, à tort ou à raison. Certes, d'une boucle à l'autre ou d'un passage (si tant est qu'on puisse parler de passage) au suivant, les repères sont généralement perdus, et la cohésion rythmique semble faire des bonds au-dessus de la surface, sans qu'il y ait de réel lien d'un bond à l'autre, mais peu importe : on peut se mettre à bouger la tête n'importe comment, en faisant un peu ce qu'on veut. C'est un peu comme pour ce texte que j'écris : il n'y a pas de règles donc on ne peut se tromper. C'est parfait pour moi qui ai toujours peur d'être jugé, observé, et qui suis sévère critique de tout y compris moi-même.

Oh et puis mince, hein !

Lorsqu'on se penche un peu dessus, on constate que la définition de « musique » est assez bancale, ou en tout cas ouverte. Le site du Larousse nous gratifie ainsi de la formule « Art qui permet à l'homme de s'exprimer par l'intermédiaire des sons. » Au fond, c'est exactement ce que fait Merzbow, et l'expression n'implique nullement que tout un chacun doit être en mesure de comprendre ce qui est exprimé. Si des extraterrestres débarquaient sur notre planète dégueulasse d'hypocrites pas rigoureux et nous parlaient dans leur langue (l'image du mec de La Soupe aux choux me vient à l'esprit), il est indéniable qu'il s'agirait d'une forme d'expression, quand bien même nous ne pourrions vraisemblablement rien en tirer.

Certains prétendent et prétendront que quiconque dit apprécier le harsh noise essaye juste de s'éloigner des autres pour les traiter de « normaux » (allez donc voir les commentaires YouTube – quoique, non, oubliez : votre temps vaut mieux que ça). C'est peut-être vrai pour certains, mais cela demande une telle motivation que c'est déjà un trait de caractère assez marquant ; et encore, je ne sais pas si même des gens motivés pourraient écouter ça durant plusieurs heures si elles n'en retirent pas un réel plaisir autre que celui de se sentir différent.

Pour ma part, de toute manière, sur le plan musical, j'ai été différent dès l'école primaire. J'ai écouté de la musique classique car je n'avais, en gros, que ça sous la main. Je n'avais personne ou presque pour m'ennuyer en disant « Nya nya nya, c'est un truc de vieux », etc., et cela m'a permis de trouver ça cool en étant honnête avec moi-même. Cela montre (même si ça n'était plus à prouver selon moi) l'importance du contexte dans nos actions et nos choix. La question n'est pas de s'éloigner du conventionnel, mais d'oublier ce qu'est le conventionnel, et même d'oublier qu'il existe. Il faut regarder aussi objectivement que possible ce que ces sons provoquent en nous, et « objectivement », ça ne veut pas juste dire « seul et sans prêter attention aux remarques d'autrui ». Écouter objectivement, cela implique un oubli du passé. Et puisque oublier notre passé est loin d'être évident, il est ridicule de penser qu'il s'agit d'une propriété binaire, façon « objectif ou subjectif » : l'objectivité est une quête sans fin – on va de plus en plus loin sur une route qui s'étend à perte de vue, et on peut donc toujours progresser. Comme l'a dit Socrate (ou pas) : « En toute objectivité, je peux dire que je ne suis pas objectif. »

Je ne peux nier qu'il m'arrive bel et bien de ressentir un certain plaisir en m'éloignant le plus possible des trucs grand public, mais c'est plutôt parce que je peux ainsi compenser pour toutes ces fois où je n'ai pas pu me défendre face à des assauts sonores de trucs conçus pour lobotomiser des collégiens et leur soutirer du pognon. C'est une manière presque comme une autre de se ressourcer, et cela n'est qu'un bonus venant s'ajouter à ce que peut déjà me faire ressentir le noise.

À vrai dire, quand j'écoute trop de trucs conventionnels (ou simplement des choses auxquelles je commence à m'habituer), j'ai parfois l'impression de tourner en rond : « Ils poursuivent tous le même but », « Ils se font chier à aligner des notes en respectant des règles que personne ne peut vraiment expliquer », « Ils ont deux ou trois instruments qui se courent après ». Tout cela peut m'amener, selon mon état d'esprit du moment, à me dire « Oh et puis merde ! » et à rechercher le changement, dans sa forme la plus drastique. Un peu comme quand j'étais petit et qu'en tentant de corriger ma trajectoire dans Mario Kart je partais complètement en vrille de l'autre côté et me retrouvais dans l'herbe, sauf que là il n'y a pas d'herbe donc on s'en fiche.

La musique de ce style est vendue comme bourrine (en tout cas, cet album est vachement présenté sous cet angle par Relapse Records), mais quand on est pépère ça ne l'est pas tant voire pas du tout. Ce qui peut être gênant, à mes yeux, avec le noise (ou avec toute source de sons, à vrai dire), c'est :

Après tout, si on veut explorer le monde musical, autant faire les plus grands bonds possible. Si on se casse la figure, on peut toujours réessayer plus tard et aller ailleurs ; le coût est nul. D'où, selon moi, l'intérêt de tester régulièrement ses limites, non seulement en se confrontant à des œuvres extrêmes (et elles peuvent l'être de nombreuses manières), mais également en revenant quelquefois sur des styles ou artistes que l'on a pas pu appréhender convenablement lors d'essais précédents. Avec Merzbow comme avec beaucoup de choses, j'en arrive maintenant à me demander pourquoi je n'ai pas écouté ça avant (ou pourquoi je n'y parvenais pas), et il est plutôt difficile de comprendre l'évolution qui m'a permis d'apprécier ça.

Stimuli

Le cerveau fonctionne souvent comme une boîte noire dans laquelle on fourre des stimuli, et pouf, des souvenirs, pensées ou réactions diverses en ressortent. Merzbow nous gave de tels stimuli, parfois à une cadence étourdissante, et cela provoque… un peu n'importe quoi. C'est rigolo. Tel son fera penser à un dentiste (c'est assez fréquent, ça, avec le harsh noise) ou aux gargouillis d'un cours d'eau, et on verra même surgir ici et là une borne d'arcade. L'important est de ne pas tenter de résister à cet afflux de sons ; il faut l'embrasser et laisser le cerveau faire son travail, qui n'est justement pas une tâche prédéterminée. Avec les parallèles faits par le cerveau viennent alors parfois des images étonnamment colorées, et je me surprends à trouver certains passages plus expressifs – d'un point de vue visuel, en tout cas – que beaucoup d'œuvres bien plus conventionnels.

Une fois l'album terminé, on se sent soudainement rejeté d'un monde qui commençait à nous accepter, et on se dit (enfin… je me dis, en tout cas) que ça n'était pas si mal. Le silence peut même sembler oppressant, pendant quelques secondes. On vient plus ou moins de se verser du détergeant dans la tête, un peu comme lorsqu'on met plein de peinture d'une couleur donnée jusqu'à ce que, par dilution, on ne voit plus qu'elle. Les bruits nous enveloppent, deviennent omniprésents et nous protègent du reste du monde, même s'ils peuvent être de prime abord eux-mêmes perçus comme une menace.

La musique de Merzbow m'a certes déjà semblé oppressante pour effectuer certaines tâches nécessitant une grande concentration (on peut avoir alors l'impression d'être constamment dérangé), mais bizarrement il me semble également avoir des souvenirs de fois où cela m'a au contraire aidé à travailler, comme par exemple pour me motiver afin de relire une nouvelle alors que j'avais été contrarié. Ces réactions sont probablement gouvernées par d'innombrables paramètres, qui sont assez difficiles à cerner et lister.

Morceaux

Même si je ne suis pas toujours bien fan de cette pratique, je vais rapidement passer sur chaque morceau indépendamment, peut-être parce que ça présente un certain challenge, mais aussi pour prouver qu'il existe certaines subtilités (le problème étant qu'il faut souvent admettre leur existence pour les ressentir). D'ailleurs, j'ai parfois constaté que mon ressenti collait à certains titres alors que j'écoutais ça sur ma chaîne hi-fi et que je ne savais pas quel était le titre du morceau courant.

1 – Woodpecker № 1
Je crois que Merzbow prétend que cet album n'est pas si influencé que ça par le métal, mais ce morceau me fait indéniablement penser à du grindcore. Les crissements les plus aigus sont posés comme du chant sur une base plus grave. Plus loin dans le morceau, je jurerais même que des espèces de chœurs rejoignent les festivités, avant de se retrouver peu à peu dans une profonde solitude et d'être abandonnés au profit de ce qu'on pourrait presque appeler une couche rythmique. Finalement, nous sombrons dans une transition nettement plus grave nous préparant à la partie 2.
2 – Woodpecker № 2
Assez vite, l'image d'un hélicoptère me vient, mais il est bien vite réduit en cendres par des arcs électriques. L'aspect collaboratif entre les couches a disparu pour de bon : nous sommes pris dans une tempête où chacun tente seul de s'en sortir. De temps à autres, à travers les éléments déchaînés, on entrevoit un bout de terre, de montagne, mais sans jamais prendre pieds sur ces planchers idylliques.
3 – Spiral Blast
La lutte est achevée, et on réalise qu'elle a toujours été vaine ; les éclairs perçants fusent dans le vide, leurs victimes ayant déjà succombé.
4 – My Station Rock
J'aurais tendance à dire que ce morceau est plutôt pépère (ce qui serait cohérent avec le titre, d'ailleurs), mais peut-être est-ce juste dû à l'habitude qui s'est installée grâce aux morceaux précédents. Il est néanmoins flagrant que des sortes d'aperçus de morceaux « normaux » surgissent ici et là.
5 – Ultra Marine Blues
Je trouve le début de ce morceau presque rigolo, voire festif. Cependant, on revient bien vite à la réalité pour cinq ou six bonnes minutes de crissements semblant venir de quelqu'un cherchant à s'enfouir le plus loin possible sous une terre rocailleuse. Le dernier tiers du morceau, plus clément, devient par moments presque méditatif et nous enveloppe comme lors d'essais aérodynamiques en soufflerie, mais une soufflerie ancienne et un peu à la peine.
6 – Tokyo Times Ten
Sans surprise, ce morceau sonne de manière plutôt urbaine, évoquant le foisonnement des télécommunications au milieu de néons bourdonnants. Malgré l'activité et la population grouillante, une sensation de solitude nous prend au ventre, et des sortes de sons de vibreurs de téléphone semblent montrer que quelqu'un essaye de s'assurer que nous allons bien. Le titre se conclut sur un effet d'autoprotection, comme si nous mettions nos mains sur nos oreilles. Le bruit est alors atténué, puis oublié peu à peu alors qu'il sombre en pétaradant au loin.
7 – Worms Plastic Earthbound
Ce colosse de près de vingt-cinq minutes pourrait être fort ennuyeux s'il n'avait été qu'une version étirée des autres pistes, mais on y trouve plein de sons surprenants. Une nouvelle fois, des images plutôt urbaines me viennent, mais elles se concentrent ici sur l'aspect mécanique de la société plutôt que sur les individus eux-mêmes et les concepts intangibles qui les relient.
8 – Yellow Hyper Balls
Très sérieusement, j'ai ici vu un gars qui pète une durit en zappant frénétiquement (sur une vieille télévision à sélection de chaîne analogique) entre un reportage sur la sidérurgie et une scène de Star Wars bourrée de wookiees.

En gros

Pour ne froisser personne, j'aurais tendance à balancer une banalité du genre : « Le harsh noise, ça n'est pas pour tout le monde. » Seulement, je n'ai en réalité aucune certitude à ce sujet. Peut-être que la clef pour prendre ne serait-ce qu'un peu de plaisir en s'exposant à de tels sons n'est qu'un état d'esprit, un point de vue ou un peu de volonté d'ouverture. Je n'en sais rien. Et c'est justement une des choses qui donnent à de telles œuvres de l'intérêt à mes yeux : nous ne pouvons jamais bien être sûrs de ce qu'il se passe en nous, dans nos cerveaux d'ordinaire cajolés par le prédictible et l'harmonieux.

Nous avons besoin de quelques explorateurs un peu barrés qui tentent de repousser des limites dont le commun des mortels ne prend même pas le temps de reconnaître l'existence ; nous avons besoin de remettre en question toutes nos définitions, et de nous interroger sur le concept même d'« art ». Une fois l'horizon dégagé et les cartes redistribuées, le monde culturel peut de nouveau nous apparaître, plus vaste et intrigant que jamais. Alors certes, vous ne fredonnerez pas sur Pulse Demon, et je doute qu'un frisson vous traverse l'échine à un quelconque instant de cet album, mais après tout il existe une foule de façons d'apprécier un afflux de sons, et les œuvres « normales » ne vont pas s'enfuir pendant que vous écoutez un peu autre chose.